Elle croisait ses bras alors qu’elle se laissait tomber sur la feuille d’un arbre. Encore une aventure de plus au tableau ! Peter, les enfants perdus et elle, c’était une histoire qui durait depuis tellement d’années qu’elle ne se souvenait plus comment cela avait commencé. Tout ce qu’elle s’avait, c’était qu’elle les aimait tous comme une grande sœur protectrice et vigilante, et surtout, son petit Peter. Elle était très possessive avec lui, peut-être même trop, mais c’était parce que son attachement envers lui était sincère et pur. Mais elle tenterait tout de même de tirer quelques conclusions des derniers évènements qu’ils avaient pu vivre ensemble.

En tout premier lieu, elle avait détesté cette « Wendy » et cette manie qu’avait Peter a toujours aller écouter ses histoires, à Londres. Il la voyait comme une « maman de substitution » potentielle, elle, comme une nuisance, une de ses « filles » qui voulaient se faire une place dans son univers et qu’elle ne pouvait pas accepter. D’autant plus qu’elle ne supportait pas de partager son meilleur ami et que ce dernier, séducteur malgré son jeune âge, passait son temps à faire du charme à l’anglaise, quitte à s’attirer les foudres de la fée. En effet, alors qu’ils se rendaient tous ensemble au Pays Imaginaire, fortement agacée par la présence de l’adolescente, la blondinette s’envola loin du petit groupe pour trouver les enfants perdus et les retourner contre cette étrangère qui allait rentrer dans leur monde, contre cette « Wendy-à-plumes ». Avait-elle pensé une seule seconde que cela pourrait éventuellement la tuer? Allez savoir. Elle n'avait jamais répondu à cette question, peu importe le nombre de fois où par la suite Peter a bien pu le lui demander. Elle se rappelait comme elle avait ri en voyant l'autre fille tomber dans le vide, déconcentrée pendant son vol. Elle avait eu ce sentiment de victoire qu'elle appréciait tant, ce petit soulagement de ne plus avoir de potentielle rivale. Mais non, il avait fallut que Peter la sauve et qu'ils flirtent ensemble. Et ça, elle avait eu beaucoup de mal à le supporter. Mais la suite fut pire encore quand les enfants perdus, SES petits enfants perdus, la trahirent et révélèrent à son garnement favori que c'était elle la responsable de tout ça. Le rouquin rentra dans une rage furieuse et, pour la première fois de sa vie, se fâcha contre sa meilleure amie et la chassa une semaine du Pays des Merveilles.

Cette colère terrible jumelée à sa naïveté expliquèrent surement pourquoi, sous la promesse qu'aucun mal ne serait fait à Peter, cette dernière révéla le repaire de ses amis au terrible Capitaine Crochet, ne comprenant sa terrible erreur qu'une fois enfermée dans une lampe à huile, le rire terrible de son ennemi raisonnant dans ses oreilles. Non... Sa jalousie maladie, son manque de confiance n'avaient pas pu causer la perte de celui qu'elle aimait plus que tout, elle ne pouvait pas supporter cette idée. Non, elle ne laisserait pas la personne qui comptait le plus payer le prix de ses erreurs. S'échappant après de multiples tentatives, la jeune fille se précipite auprès de Peter pour lui sauver la vie, quitte à risquer la sienne. Elle manqua de peu la mort, mais elle ne regrettait pas le moins du monde cela. Elle aurait tout fait pour ceux qu'elle aimait et s'ils se retrouvaient dans une telle situation, cela était entièrement de sa faute. Elle avait compris, compris qu'il pouvait aimer Wendy sans pour autant ne plus l'aimer elle, compris qu'elle aurait toujours une place dans son coeur. Et c'était ce qui l'avait poussée par la suite à l'aider à libérer non seulement les enfants perdus mais aussi Wendy et sa famille, à accepter cette dernière et à s'en faire une amie. A être triste de la ramener à Londres mais à retrouver le sourire grâce à la pensée des nombreuses autres aventures qu'elle allait connaître. Au futur qui brillait de mille feux juste devant eux. « Tu viens Clochette ? » Elle se retourna et vit Peter, son éternel sourire sur les lèvres qui lui tendait la main alors qu’elle se relevait, faisant un tour sur elle-même en éclaboussant tout le monde de sa poussière de fée. La vie continuait et ce qu’ils avaient vécu, elle le garderait tout au fond de son cœur et elle ne l’oublierait jamais.


« Faye tu t’occupes de la table numéro 3 ? » « Pas de souci, j’y vais ! » La brunette jeta sa cigarette un peu plus loin alors que rentrant de nouveau dans le batiment, elle allait prendre de nouveau la commande de quelques clients un peu plus loin. Elle ne put s’empêcher de grimacer en reconnaissant la bande de lycées ‘populaires’ de son bahut. Elle ne les avait jamais aimé et ce n’était pas aujourd’hui que ça allait changer. D’ailleurs, le mépris était réciproque et depuis qu'elle était arrivée en ville il y a de cela dix ans, la jeune fille et ces derniers se livraient une guerre froide des plus féroces. D'ailleurs, alors qu'elle s'approchait d'eux avec un sourire crispé, elle ne put s'empêcher de les voir la prendre de haut et se moquer d'elle, en chuchotant quelques paroles venimeuses les uns aux oreilles des autres. Elle soupira mais prit sur elle, histoire de ne pas s'énerver et pour cause : elle avait besoin de ce job. Et pas qu'un peu, les autres comptaient sur elle, comme ils le feraient sur leurs mères. Si vous demandiez à Faye combien de frères et soeurs elle avaient, elle vous répondrait douze, alors que si vous regardiez dans son carnet de naissance, vous verriez qu'elle était fille unique. Et pour cause, la vie n'avait pas ménagée la gamine et de nombreuses épreuves l'avait conduite de la fille peureuse et isolée, à cette jeune femme forte et indépendante. Elle était née en Italie, d'une mère absence et d'un père abusif qui pendant les huit premières années de sa vie, la maltraita et l'abusa de toutes les manières qu'on puisse imaginer. L'enfant grandissait à peine qu'un malaise l'habitait constamment. Elle aurait probablement mal tournée si sa grand mère, la seule personne qui tenait à elle ne l'avait pas sortie des griffes de son détracteur et emmenait avec elle au Canada, dans cette charmante petite ville. Pendant deux longues années, Faye fut heureuse et put se reconstruire. Mais une nouvelle fois, le destin allait détruire sa vie et sa grand mère mourût d'un cancer du sein, après une longue maladie, la laissant de nouveau seule et livrée à elle-même. « Alors souillon, on est tellement pauvre que l'on doit travailler à coté des cours? Remarque, ça te permettra peut être de t'acheter de nouveaux vêtements pour remplacer les guenilles que tu portes. » Les rires fusèrent alors que la brunette se contentait de hausser un sourcil. Ce genre de remarques ne l'atteignait plus depuis bien longtemps et pour cause, les quelques mois qu'elle avait passé à errer dans la rue, de peur qu'on ne la renvoie chez son père lui avait forgé le caractère, jusqu'à ce qu'elle soit traînée de force à un orphelinat, tout aussi sordide et délabré que l'on peut l'imaginer. C'est à cette époque que naquit son aversion sur ces adultes qui se pensent charger d'une forme de pouvoir quelconque : ils brimaient les enfants sans se soucier de leurs besoin, ils se montraient cruels avec eux. Mais c'est aussi à ce moment de sa vie qu'elle apprit l'amitié et la compassion, avec ceux qu'elle considèrait comme sa famille et plus encore, avec Valéry. Il était comme son double, ils étaient en permanence ensemble. Enfin, autrefois. Aujourd’hui, il n'avait d'yeux que pour sa petite amie et il ne s'intéressait plus à elle, ni même aux autres enfants. Et c'était à elle de trimer ici pour gagner de l'argent, à s'occuper des plus petits, à devoir jouer à la maman. Elle avait l'avantage d'être une excellente élève à l'école mais ses absences très fréquentes commençaient à faire grincer des dents ses professeurs. Elle était piégée, piégée dans sa propre vie alors qu'elle n'avait même pas encore dix-huit ans. « Alors souillon, qu'est ce que tu nous conseilles? » « Pour les autres, je ne sais pas, mais dans ton cas, je te conseillerais un gâteau aux carottes, il paraît que ça rend aimable et qu'en plus de ça, ça rend les fesses roses ! Comme ça Mike et Andrew pourront en profiter ! » Elle tourna les talons avec un sourire victorieux alors que déjà à la table, un début de dispute sembler enfler. Ce n'était pas parce qu'elle ne devait pas s'énerver qu'elle allait se laisser faire ! Et puis après tout, elle n'avait fait que répondre à une question d'une cliente, non?